Après une courte marche à travers Olphéra, Sya, précédée de son nouveau maître, arriva devant la villa Naldor. Haril lui ouvrit la porte et la laissa seule afin qu’elle s’installe tranquillement. Elle lui rendit sa veste, et, ayant trouvé la salle de bains, s’y enferma de longs instants.
Le bain était un luxe auquel elle avait rarement eu droit dans sa vie. C’est donc timidement qu’elle s’aspergea, d’abord, rinçant ses nombreuses plaies et égratignures. Puis, sans aucune modération, elle remplit la bassine d’eau brûlante, et s’y immergea entièrement. Elle vida à moitié une bouteille de shampooing pour homme dénichée dans un placard. Une fois sortie, elle fouilla dans les tiroirs pour y récupérer des échantillons de maquillage et de crèmes qu’elle appliqua consciencieusement sur sa peau abîmée. Enfin, enveloppée dans une grande serviette pourpre, elle s’aventura hors de la pièce.
Elle n’avait d’autres vêtements propres, et Naldor ayant récemment emménagé, elle ouvrit toutes les boîtes de carton qui croisèrent son chemin. Finalement, elle dut se résoudre à enfiler des vêtements pour homme. Elle n’avait rien d’attrayant dans ces habits amples, mais elle était propre, et cela lui suffisait. Dans la recherche désespérée de chaussures, elle découvrit une véritable caverne d’Ali Baba. Le bijoutier n’avait apparemment pas mis en boutique toutes ses œuvres. Un petit carton contenait, en effet, de précieuses orfèvreries soigneusement enroulées dans une espèce de mousse blanche.
Elle hésita quelques secondes. Auparavant, les seuls rapports qu’elle avait eus avec les bijoux étaient le vol et la contrebande. Sa main s’arrêta au dessus d’une paire de boucles d’oreilles ciselées, et finalement, s’en empara. Sya n’avait pas l’intention de les voler, de toute façon. L’androgyne n’avait-il pas précisé qu’il voulait voir ses œuvres portés par une femme ? Elle allait se mettre tout de suite au travail, et elle les enfila sur le champ.
L’Hybride aéra et rangea la salle de bains. Elle se sentait fraîche et libre. En passant devant un miroir, elle rencontra une jeune femme aux cheveux encore humides, coiffés en arrière, au teint pâle délicatement poudré, aux yeux pétillants et parée d’une splendide paire de boucles d’oreilles ciselée.
C’est comme cela qu’elle parut aux yeux d’Haril. Aucune gêne à porter ses créations sans lui avoir demandé son avis. Elle s’installa en face de lui, dans l’un des rares meubles installés.
- « Ca fait du bien… Bon, maintenant, voulez-vous que je vous aide à vider vos cartons, à installer votre marchandise, ou préférez-vous attendre demain ? »
En réalité, une autre question intéressait la jeune femme.
- « Oh, mais j’oubliais… vous avez sans doute faim, où est la cuisine ? Nous discuterons mieux devant un bon dîner… »